• OCCITANIE - La Vézère, vallée de l'homme.

     

     

     

    Il est vrai que la première des préoccupations des touristes qui se rendent dans la vallée de la Vézère dite « Vallée de l’homme » est celle de découvrir la vie des hommes préhistoriques : homo sapiens, Cro-Magnon, Neandertal et les autres.  Il est vrai que la vallée de la Vézère est un lieu magique . C’est sans doute pour cela que l’instinct de l’homme l’a fait s’y installer. Ce à quoi  le visiteur  ne songe pas c’est  que d’autres hommes desquels on parle moins y ont vécu. On leur doit une certaine reconnaissance.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

     Nous sommes à Plazac, un petit village du Périgord.

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui. 

    Sur un mur de l’église une plaque est fixée.

     

     Ricou Mathivet : qui en France le connaît ? Il a été longtemps le sonneur de cloches du village. Dans le bulletin municipal a été consigné le fait que c’est à la demande des administrés que cette plaque a été fixée.

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    La Vézère : vallée de l'homme, hier et aujourd'hui.

    La Vézère : vallée de l'homme, hier et aujourd'hui.

     

    La Vézère : vallée de l'homme, hier et aujourd'hui.

     « On ne saurait se faire une idée de [la] joie [de Quasimodo] les jours de grande volée. […] il montait la vis du clocher plus vite qu’un autre ne l’eût descendue. [Ses aides…] se pendaient aux câbles, le cabestan criait, et l’énorme capsule de métal s’ébranlait lentement. […] Le premier choc du battant et de la paroi d’airain faisait frissonner la charpente […]. Enfin la grande volée commençait ; toute la tour tremblait : charpentes, plombs, pierres de taille, tout grondait à la fois, depuis le pilotis de la fondation jusqu’aux trèfles du couronnement. […] La cloche déchaînée furieuse présentait alternativement aux deux parois de la tour sa gueule de bronze, d’où s’échappait ce souffle de tempête qu’on entend à quatre lieues. » Victor Hugo, Notre-Dame de Paris 
     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

     

    Dans beaucoup de communes françaises les sonneurs de cloches se sont succédés au fil des siècles . Ils ont été de toutes professions, maîtres ou valets, clercs ou laïcs, grands ou  petits sonneurs, garçons sonneurs, petites gens (hypothétiquement clochards) recrutées pour les seconder… 

     

     

    <<< La manœuvre du "bourdon" de Notre Dame de Paris.

    Relevé dans "Le Petit Journal "     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    Pâques est le grand jour pour les sonneurs de cloches, le jour solennel où, de toute la force de leurs bras, ils mettent en branle campanes et bourdons. Ce jour-là, le sonneur est le maître des régions éthérées ; il les emplit de la voix sonore de ses carillons. En dépit d' un vieux dicton qui le représente comme un fervent ami de la dive bouteille, c' est surtout de musique aérienne que le sonneur se grise ce jour-là.
    Le sonneur de cloches était, jadis, un personnage étrange, mystérieux, fantastique. Il habitait dans le clocher, vivait avec ses cloches qu' il connaissait, qu' il aimait et dont la voix lui était familière. Le romantisme a singulièrement exploité ce type. Peut-on parler du sonneur sans évoquer immédiatement la figure grimaçante de ce terrible Quasimodo que créa l' imagination puissante de Victor Hugo ?
    Dans les traditions populaires de tous les pays, il est maintes et maintes histoires où les sonneurs, les carillonneurs, les veilleurs de beffroi jouent leur rôle. Qui dira les innombrables légendes dont ces hôtes des antiques clochers sont les héros ?...
    Mais le temps est passé de ces histoires miraculeuses. Les vieux villageois eux-mêmes les ont oubliées. Le scepticisme moderne a débarrassé le sonneur de son auréole fantastique. Pour les gens d' autrefois, la sonnerie des cloches était un chant ; c' était la voix de la foi qui montait au ciel comme un encens harmonieux. Pour les gens d' aujourd' hui, ce n' est plus qu' un bruit, un bruit souvent fâcheux qui les importune et trouble leur tranquillité.
    N' a-t-on pas, en maintes localités, interdit les sonneries de cloches comme attentatoires à la liberté de penser et à la quiétude des citoyens ?...
    Les cloches ne protestent pas : elles sont résignées au silence. S' il faut en croire la légende, il n' en fut pas toujours ainsi. J' ai ouï conter, dans mon enfance, l' histoire des cloches d' une vieille abbaye de Flandre que les sans-culottes enlevèrent, en 1792, pour en faire des canons. On les avait descendues à grand'peine du clocher où, depuis des siècles, elles chantaient de matines jusqu'à vêpres, et on les avait déposées sur un lourd chariot garni d' un épais lit de paille. Il s' agissait de les conduire à la fonderie de Douai. En route, le charretier jurait, sacrait sans relâche, et les cloches frémissaient d' entendre de tels blasphèmes.
    Et voilà qu' un beau soir - c' était justement le Samedi-Saint, veille de Pâques - comme le mécréant sacrait plus fort que de coutume, les cloches tout à coup s' ébranlèrent, s' entre-choquant les unes contre les autres, emplissant l' air d' un déchaînement de sonorités furibondes ; et puis elles s' enlevèrent d' elles-mêmes et disparurent dans la nuit. L' homme fut retrouvé inanimé auprès de son attelage. Quant aux cloches, elles s' en étaient revenues au clocher abbatial, et le lendemain, dimanche de Pâques, dès l' aube, les gens du pays ne furent pas peu surpris de les entendre sonner à toute volée.
    C' étaient là de belles histoires qui jadis faisaient frissonner les gens à la veillée et que seuls se rappellent, aujourd' hui, les amateurs de folk-lore, les fervents des traditions populaires, et aussi les poètes qui aiment la voix des cloches et le pittoresque des clochers.

    Les habitants de Bootzheim.

    Un peu plus bas sur un des piliers de la halle une autre plaque indique le nom de la place du village « Place de Bootzheim ». Au dessous, il est précisé "village d'Alsace réfugié en 1939".

    Cela mérite des explications.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

     Le village de Bootzheim en haut à droite, pas très loin de Colmar.

      Le 1er septembre 1939  la Pologne vient d'être envahie par les troupes nazies. La guerre est déclarée.

    La mobilisation  générale est annoncée par affiches.

    La  population entre la frontière allemande et la ligne Maginot, sur une bande de 20 kms reçoit des ordres d'évacuation en vue d’une éventuelle invasion allemande.

    Le 2 septembre 1939, les réfugiés prennent la route avec seulement 30kg autorisés, abandonnant  leurs maisons, leurs cultures, leurs bêtes. Le voyage se fait dans de très mauvaises conditions, pour certains dans des wagons à bestiaux, pour d'autres à pied, en vélo ou encore en charrettes!

    L’installation dans des maisons anciennes, pas toujours en bon état diffère des conditions de vie en Alsace. La vie à la campagne est complétement différente, la cuisine, le dialecte aussi.

    Périgueux voit sa population passer de 20 000 habitants à 40 000. La ville connaît alors une évolution de son économie avec l’apport des nouveaux arrivants.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    La halle en bas de l'église.

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    Eglise de Plazac.

       

    Chaque jour voit la naissance d’un  bébé alsacien à Périgueux. L'hôpital de Strasbourg doit prêter main forte à celui de Périgueux.

    Une circulaire préfectorale datée du 1er août 1940 et envoyée aux maires des communes informe les 80 000 Alsaciens installés en Dordogne que "en accord avec les autorités d'occupation le rapatriement des évacués du Bas-Rhin allait commencer", chacun étant libre de partir ou de rester. Mais le Bas-Rhin et le Haut-Rhin sont intégrés au pays de Bade sous administration allemande.

     

     

     Certains choisissent de rentrer à Strasbourg. Un certain nombre (à peu près 20%) s'implantent en Dordogne.
     

    La Vézère : vallée de l'homme, hier et aujourd'hui.

     

    Ces  événements  historiques qui ont profondément marqué les populations des deux villes ont donné naissance à un jumelage en 1984, entre les deux cités considérées comme « villes sœurs ».

       

    Georges Agniel de Montignac.

    Un peu plus au nord de Plazac, le village de Montignac s’étale  au long de la Vézère. C’est ici que Georges Agniel vient chaque année en vacances. Il passe une partie de son temps accoudé à la fenêtre d’une  grande maison, au bord de la rivière, dont sa grand-mère occupe le troisième étage.

    Georges habite Nogent-sur Marne. C’est pour lui un plaisir de retrouver chaque été ses camarades avec lesquels il adore battre la campagne. En 1940 il a 16 ans. Le 12 septembre de cette année il retrouve ses amis Simon Coencas et Jacques Marsal. Les trois adolescents rencontrent  par hasard  Marcel Ravidat au pied de la colline qui surplombe le village.

    Quelques jours auparavant, le 8 septembre 1940, au-dessus de Montignac, dans la clairière d’un coteau boisé de pins et de chênes, non loin d’un sentier,  Marcel Ravidat (1922-1995) , avait repèrè, avec quelques camarades, … une excavation, mise au jour des décennies plus tôt par la chute d’un grand arbre  et couverte de genévriers et de ronces . Son inséparable chien Robot, bâtard de setter et de terrier à longs poils roux, gratte au fond d’un trou de moins d’un mètre de côté et de profondeur . Pourquoi ? Marcel découvre alors, au bas de cet entonnoir, un second orifice d’à peu près 20 centimètres de diamètre. Il a l’idée d’y jeter des pierres : elles roulent longtemps dans les profondeurs…  Ravidat se rend compte qu’une pénétration serait possible après désobstruction.

    Marcel Ravidat propose à ses compagnons rencontrés par hasard de l’accompagner jusqu’à l’excavation. C’est ainsi que ce 12 septembre 1940, la grotte préhistorique de Lascaux fut découverte. Un mois après Georges Agniel retrouvait Nogent-sur-Marne pour la rentrée scolaire…

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    Montignac au bord de la Vézère

     

    La Vézère : vallée de l'homme d' hier et d'aujourd'hui.

    Sur la maison qu'occupait Georges durant ses vacances, une plaque rappelle la découverte de Lascaux.