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Le Cami - N°77
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Dans la famille
des ponts :
Le pont-canal.
77
PONT-CANAL Construit en aval des 9 écluses de Fonseranes, sur le Canal du Midi, il a été mis en service en 1858. Le pont enjambe l’Orb. Grâce à lui, les navires passent au-dessus de et non sur la rivière.
C’est un ingénieur du Canal, Urbain Maguès, qui propose en 1854 l’actuel tracé qui sera retenu et en novembre 1857 le pont-canal est inauguré.
Mis en service en 1858 il véhicule, depuis, la voie d’eau et permet ainsi le franchissement de l’Orb au pied de l’acropole de Béziers.
D’une longueur de 240 mètres et d’une largeur de 28 mètres, sa hauteur est de 12 mètre . La galerie qui court sous le chenal permet d’entretenir l’ouvrage.
C'est un des plus grands ponts-canaux de France et il a fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le 29 août 1962.
DERRIERE LA CARTE POSTALE.
Cerbère, pourquoi une gare aussi grande ?
Une carte postale, c'est normalement fait pour garder le contact avec ceux qui n'ont pas la chance de partir en voyage. Faute de pouvoir ramener des photos de qualité de ses voyages mon père décida une année d'investir dans les cartes postales et de créer des albums souvenirs de ses échappées belles. En voici une qui mérite un reourà plusieurs titres.
Sur la crête qui domine Cerbère et Portbou, sont implantés ces bâtiments que tous ceux qui ont franchi la frontière franco-espagnole ont connus. Cette ancienne douane est désaffectée depuis Schengen. Ce qu’on appelle l’espace Schengen c’est un espace de libre circulation des personnes. Ce principe implique le libre franchissement des frontières par tout individu entré sur le territoire d’un des États membres
Je me souviens cependant qu’avant cela, pour accéder en voiture à ces bâtiments il fallait passer par Cerbère, ville dont nous devinons la gare en contrebas. Je me souviens de ces longues queues de voitures qui avançaient au pas sur cette route sinueuse qui montait vers le bâtiment que l’on devinait de mieux en mieux virage après virage. Il y avait toujours comme une petite angoisse avant l’arrêt devant les bottes toujours bien cirées du garde-frontière. La question fatidique raisonne encore dans ma tête.
- « Vous avez quelque chose à déclarer ?"
Non, à l’aller nous n’avions rien à déclarer. C’est au retour que nous jouions au quitte ou double parce que le coffre de notre voiture contenait toujours quelque produit qui nous mettait « hors la loi ». Nos incursions en catalogne étaient le plus souvent motivées par notre approvisionnement très économique en pastis ou autre boisson alcoolisées dont le prix était hors de concurrence. Prendre deux bouteilles plutôt qu’une amortissait plus amplement notre déplacement…même si le prix de l’essence était sans commune mesure avec celui d’aujourd’hui. L’occasion était bonne d’ailleurs d’en profiter pour remplir le réservoir… même si on reprochait ici ou là au carburant d’être de moindre qualité par rapport à celui distribué par les pompes du pays.
Aller en Espagne en passant par Portbou c’était aussi l’occasion de redécouvrir à chaque fois les magnifiques points de vues qu’offrait la côte entre Roussillon et Catalogne, entre Côte Vermeille et Costa Brava, On apprécie les 6 km de côte en serpentin, avec réserve marine, plages de galets et petites criques exclusivement accessibles par la mer. On profite d'un arrière-pays sauvage avec ses plantes odorantes.
Le paysage de Cerbère est l’œuvre d’une vingtaine de vignerons, producteurs de vins d'appellations Collioure et Banyuls. Les vignes grimpent sur les hauteurs et descendent tour près des rochers. C’est une explosion de couleurs, vertes l’été, orangé en automne.
Ces bâtiments ont vu passer des milliers de civils catalans ou espagnols qui fuyaient, après le coup d'état franquiste de 1936 la longue guerre civile. Des centaines de milliers de femmes, enfants, vieillards, soldats de l'Armée républicaine espagnole et combattants étrangers des Brigades Internationales. Le 9 février 1936,.
Sur la carte on devine la gare et les voies de chemin de fer de Cerbère, dernière gare de France avant la frontière, aux confins de la Catalogne française.
Avant 1870, Cerbère était un endroit très calme, abritant quelques familles de vignerons, des pêcheurs et quelques douaniers essayant d'empêcher les contrebandiers de franchir la frontière.
Aujourd’hui Cerbère, c'est, avant tout la gare internationale, dont la taille est disproportionnée par rapport à la ville elle-même. La verrière qui date de 1880 est l’œuvre de Gustave Eiffel. En traversant la ville on longe les immenses arcades et un fantastique mur de briques rouges. Cet espace monumental est aujourd'hui largement désaffecté.
Comment expliquer la taille et la majesté des lieux ?
C’est en 1878 que la gare a été officiellement mise en service par la Compagnie des chemins de fer du Midi. La commune de Cerbère n’existe, elle, que depuis 1888.
La gare est née de la nécessité de développer les liaisons avec l’Espagne et, au-delà, avec l’Afrique du Nord. Pour cela, a été prolongée la ligne de chemin de fer dont le terminus était alors Perpignan.
Les voies sont mises en service jusqu'à Banyuls le 14 août 1875. Enfin, Port-Bou, en Espagne est atteint le 23 janvier 1878 grâce à un tunnel percé à partir de Cerbère.
Mais cela n’explique toujours pas la taille de la gare française.
Ce qu’il faut savoir c’est que les gares de Portbou et Cerbère sont reliées par deux types de voies aux écartements différents : des voies de largeur « normale » françaises, dont l'écartement est aligné sur le standard européen et des voies plus larges, ibériques. On ne sait pas trop ce qui a poussé les espagnols à faire le choix d’un écartement différent. Décision politique ou technique ?
La vingtaine de centimètres de différence a rendu indispensable le transbordement des marchandises des wagons espagnols vers les wagons français et inversement. Ce transbordement est à l’origine de l’importance des activités de la gare, de sa taille et du développement économique de la ville.
Ce transbordement concernait tout particulièrement, dans un premier temps les denrées périssables. Le chemin de fer était le moyen idéal, un luxe à l’époque, pour transporter les oranges de la Costa Brava à Paris ou aux villes du nord de l’Europe : un voyage de plus de 1000 kms.
Une aubaine pour des marchands qui ont trouvé l’occasion de développer une activité en organisant ces transbordements, le dédouanement et la réexpédition des marchandises.
Pour cela Il fallait des mains. Elles ont été trouvées parmi les femmes des cheminots du village.
Dès qu’un wagon arrivait, des équipes étaient recrutées. Ces femmes en avaient fait leur métier : on les appelait les « transbordeuses ». Il y avait les « remplisseuses », les « passeuses », les « videuses ». manipulant des paniers d’une vingtaine de kilogrammes pendant seize à dix-sept heures en haute saison Chacune avait sa fonction avec pour mission impérieuse de veiller à la préservation de la qualité des fruits qui devaient faire le long voyage vers Paris, Bruxelles, parfois même jusqu'en Russie. Ce travail rude de six heures du matin à onze du soir avait pour compensation d’offrir un soutien appréciable aux foyers dont la femme gagnait souvent beaucoup plus que le mari, cheminot ou simple vendangeur.
Pendant plusieurs mois, de novembre à mai de grandes quantités de fruits passaient d’un wagon à l’autre via une passerelle aménagée à cet effet.
A Cerbère beaucoup d'habitants travaillaient aux chemins de fer ou chez les transitaires. Ces activités ont permis le développement du village devenu le plus riche de la région. Elles ont été aussi l’occasion, comme dans toutes corporations, de querelles sociales qui opposaient les compagnies de fret aux transbordeuses qui se plaignaient des mauvaises conditions de travail et des salaires toujours bas..
En 1930, portée par le fret, Cerbère est une gare frontière florissante.
Des villas et des bureaux de douane ornés sont construits dans les collines; une nouvelle route pour les voitures de
tourisme est tracée.
Durant les années 1950, la mise en place des systèmes mécaniques à écartement variable et à changement d'écartement, a rendu le travail des transbordeuses de plus en plus aléatoire jusqu’à le supprimer définitivement.
Le transport routier longue durée, la navigation, le fret aérien se sont développés. Le chemin de fer perdant son importance, Cerbère a perdu son prestige commercial tout en conservant en son sein les descendants de ces familles de cheminots et de « transbordeuses » dont la mémoire demeure au cœur de la ville au sein d’un petit musée.
Aujourd'hui, le silence de la gare de Cerbère n’est troublé chaque jour que par un ou deux trains qui y transitent, sur le long trajet entre Paris et Barcelone. Les maisons de douane abandonnées abritent des pigeons. On rénove lentement l'imposant Hôtel Belvédère (voir photo) du Rayon Vert qui ressemble à un navire né de la richesse économique épisodique de la cité..
Il est bon de se rappeler que la gare de Cerbère, à cinq minutes de la plage, a donné naissance à la ville. Elle en a fait un lieu historique fascinant presque « mythique ».