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La route monte de plus en plus, en suivant, à cet endroit un ruisseau qui prend sa source, là- haut près de l’étang de Lers.
Nous venons tout juste de quitter le village de « Le Port » lorsque sur notre droite, un panneau indique « Peyre Ausselère ». C’est du patois local.
Pas besoin d’aller loin pour le traduire .
En plus petit on peut lire que cela signifie « la pierre aux oiseaux ».
Nous n’avions pas remarqué, qu’à cet endroit la végétation que nous découvrions autrefois touffue, enchevêtrée, sauvage avait laissé place à un espace de verdure propre, parsemé de dômes de pierres recouverts d’herbes fines et soyeuses.
C’est, sans nul doute le résultat de l’intervention d’hommes ou de femmes passionnés venus « domestiquer » cette nature laissée à l’abandon pendant de nombreuses années.
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Des abris abandonnés, ensevelis sous une végétation anarchique qui a repris ses droits sont témoins de l'état dans lequel se trouvait le lieu avant que ne soit dévoilé ce patrimoine, témoin d'une vie très particulière.
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En amont sur le flanc de la vallée, un véritable chaos de pierres sèches qui descend jusqu’au bois laisse penser qu’il constitue le gisement qui a permis de construire des abris de fortune au bord du ruisseau, source de vie.
Il n’a fallu qu’un peu de romantisme pour associer les pierres millénaires du lieu aux chants des oiseaux qui accompagnaient les hommes bâtisseurs pour donner un nom au hameau : « Peyre Ausselère ».
C’était l’époque où,, dans cette contrée on ne parlait que sa langue de naissance que l’on a appelé plus tard « patois »..
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Quand on sait que le « courtal » en Ariège était le lieu où l’on rassemblait les
bêtes pour leur faire passer une nuit à l’abri des prédateurs on peut deviner que ces hommes bâtisseurs étaient des bergers et que le courtal de « Peyre Aussalère » n’est autre que la bergerie de la pierre aux oiseaux.
Pour y pénétrer il faut franchir le ruisseau en passant sur une énorme pierre qui fait office de pont.
Après avoir contourné un énorme rocher, nous voilà au cœur du courtal, côtoyant ces abris surprenants.
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Le panneau indiquait que certaines de ces constructions avaient pour fonction
d’abriter des familles entières durant les mois de mai à octobre, les moins rudes de l’année. Durant cette période appelée « estive » les paysans vivaient au milieu de leur troupeau. Ces abris formaient alors de véritables hameaux. Chaque construction avait sa fonction. Elle pouvait servir de réserve à fromage, d’abri pour les bêtes, d’habitation. Ces nombreuses constructions ont été utilisées jusque dans les années 1914.
Cet abri est appelé « orri ».On ne sait pas trop quelle est l'origine de ce mot..
Vient-il du latin « horreum » qui veut dire « grenier ». Il existe dans l’Espagne du nord les horreos qui sont les greniers à grains.
Vient-il du mot latin « hortus » qui était le jardin.?
On les désignait , au Moyen-Âge en employant les termes "horréum", "orréum", "orrée".
En occitan, existe le le verbe "orriar" qui signifie "aller sur la montagne ».
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Les "Orris" sont des constructions de pierres séches légèrement décalées les
unes sur les autres. Ils sont en général de forme concentriques. Leur poids fait la solidité de la construction.
Aucun ciment ni liant n'étaient utilisé , pas de terre ni de ciment, seulement de la pierre (schistes ou granit) L’ensemble était ensuite recouvert de mottes d’herbe, savamment choisie pour ses facultés à assurer une certaine étanchéité.
Nous entrons dans un orri qui servait d’habitat. On peut tout juste se tenir debout. Le devant de porte est agrémenté de pierres plates qui servent parfois de siège. De forme, le plus souvent circulaire l’abri a des murs très épais (autour d’un mètre). Quelques niches créées dans les murs servaient au rangement des ustensiles destinés à la cuisine et à la confection du fromage. La table est confectionnée dans une grande pierre plate (lauze)
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Coupe d'un "ORRI"
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On dort tout habillé enveloppé dans une couverture sur une « paillasse » constituée de mottes d’herbes, de mousses et de feuilles qui sert de matelas sans se dévêtir pendant quatre à cinq mois.
Un trou pratiqué dans la muraille laissait passer la fumée du feu que l’on faisait au cœur de l’abri et qui permettait de se chauffer et de faire cuire le bouillon dans un chaudron posé sur trois pierres.
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L'orri habitat est entouré d'abris plus petits qui servaient à abriter les animaux tels que poules, cochon, chiens.
Dans le mazuc le berger conservait ses fromages. Une petite rigole la traversait. conduisant une eau fraîche venue directement du ruisseau tout près. Il y fait bon. On comprend que cette température pouvait permettre aux fromages, rare revenu du berger d'arriver à maturation dans les meilleures conditions.
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Dans l'enclos, limité par un mur de pierres sèches les bêtes étaient gardées pendant la nuit ou parquées en attente de la traite
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Attenant à l'enclos, entre deux rochers, les brebis turbulentes, empruntaient ce couloir qui permettait de les "canaliser" afin de les traire plus facilement.
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Généralement une partie de la famille vivait dans ce village à la montagne pour surveiller les bêtes, tirer le lait, fabriquer du beurre. Le reste se maintenait dans la vallée pour s'occuper des travaux des champs.
Il arrivait cependant que toute la famille et le petit bétail montent à l'orri pendant les mois d'été. C'est ainsi que la montagne a vu se développer une véritable civilisation pastorale .
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Tout était conçu, dans ces villages pour faciliter le travail de chacun
mais aujourd'hui, on a du mal à imaginer la vie de ces familles sous ces abris sans aucun confort dans un milieu hostile où les prédateurs sont omni présents.
On retrouve pourtant des traces de ces conditions de vie archaïques dans de nombreuses régions de France.
En Provence on s'abritait dans des borris. Les burrons parsemaient les Causses dans le Cantal. Dans l'Aude ou l'Hérault les bergers s'abritaient dans des capitelles. Les cazelles étaient des constructions analogues dans le Lot. Quant au Périgord, il a conservé des vestiges de gariottes.
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