• MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop.

     

     

      

     

    MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop.


     

    La Tabacoop c’était l’entreprise où travaillaient de nombreux mondoviens.

    La Tabacoop de Mondovi dont les immenses docks étaient situés à l’entrée Nord du village a été créée durant l’année 1920.MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop.C’était la plus grande exploitation agricole du village. 

     

    Le tabac couvrait 400 hectares de terre qui permettaient une production de 2000 à 4000 quintaux par an. La culture était familiale.

    Chaque année les planteurs ( khaddarts) amenaient leur tabac à l’entreprise qui se chargeait de le conditionner avant de le vendre. Le personnel permanent comptait environ une cinquantaine de personnes.

    Cent à 200 personnes étaient embauchées chaque année pendant environ 6 mois durant la période de réception du tabac.

    Un des docks permettait la réception des ballots de tabac au moment des récoltes.

    En dehors de la période de la livraison, ce dock était disponible.

    C’est sur les quais de livraison, qu’en 1951 avait été organisée la remise des cadeaux aux enfants du personnel.

     

    SITUATION DE LA TABACOOP

     

    MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop.

    Outre son activité économique, la Tabacoop a joué un rôle social très important au sein du village. C'était un des moteurs essentiels à la vie de la cité.

     

    Un sapin qui me paraissait énorme avait été fixé pour l’occasion sur les quais. Des tréteaux, les plateaux et les bancs réservés aux manifestations sortis de la remise étaient installés non loin du sapin. 

     

     

    MONDOVI - Noël 1951

     

     Des guirlandes scintillaient sur le grand arbre pour rendre la fête plus gaie.

    Nous sommes au cœur de l’entreprise la plus importante du village, celle qui emploie le plus grand nombre d’ouvriers. La Tabacoop a été créée à l’initiative de la région pour mieux gérer la production et l’exploitation du tabac.

    Chaque année, d’une façon ou d’une autre, les dirigeants de l’entreprise font la joie des enfants en organisant un évènement à l’occasion de Noël. En 1950 le père Noël avait parcouru le village pour passer dans chaque maison occupée par les employés et remettre un cadeau à chaque enfant. Je me rappelle que l'attente fut pénible …quelle angoisse lors de la confrontation !  Même s’il nous semble reconnaître la voix chevrotante du personnage barbu, le moment est impressionnant. Je ne sais plus ce que m’a demandé papa Noël. Sans doute si j’avais été sage. Ma réponse a certainement été positive. C’est comme si on demandait au boucher si sa viande est bonne. Si j’avais été effronté j’aurais pu livrer le fond de ma pensée en disant au père Noël que je l'avais reconnu mais ce n'était pas le moment. Je tenais à mon cadeau. Et puis, à cette époque on n’avait pas l’aplomb des jeunes de maintenant.

    En 1951 Noël donna l’occasion d’un rassemblement de tous devant le sapin.

    Les docks de l’entreprise qui nous avaient donné l’occasion de parties de cache-cache mémorables servaient souvent de lieu de manifestation. C’est d’ailleurs sur ces docks qu’avait été créée une véritable petite salle de cinéma.

    MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop.

    Ci-dessus la salle des fêtes du village  alors "désertée" à cause des risques d’attentats.

    Nous avions donc droit à échéance régulière à une séance de cinéma. A cette époque la télévision n’existait pas...nous ne l'avons d'ailleurs jamais connue dans la région de Bône... Le moment récréatif était apprécié par les petits et les grands.

    En 1951 tout était encore calme même si, ici ou là, des évènements laissaient pressentir une escalade d’un conflit latent. Un après-midi de décembre, toutes les familles des employés de la Tabacoop furent conviées à un goûter. Il y avait là tous les enfants qu’ils soient européens (on appelait ainsi les familles d’origine européenne : français, italiens, espagnols, maltais etc…) ou musulmans. Souvent au cours de ces manifestations les familles musulmanes étaient représentées par le chef de famille. Il était dans la tradition que les femmes ne se montrent pas (c’est pour cette raison que sur les photos que nous présentons, seule une femme assiste au goûter) .

    Bien sûr, le père Noël était indispensable. Cette année là on « réquisitionna » René Bussutil qui n’était pas à son premier essai. Bon vivant il avait des dons naturels qui lui permettaient de s'adapter à toutes les situations.

     

    Le père Noël s’est déplacé pour l’occasion, toujours le même depuis que mon père travaille à la Tabacoop : un personnage capable de s’adapter à toutes les situations. Comique, facétieux et fin d’esprit, il a dans la peau ce qu’il faut pour être un farceur, acteur, affabulateur et, en même temps amoureux de football (il a été entraîneur de l’équipe de foot du village) et excellent joueur de boules lyonnaises. Il s’agit de mon voisin de palier (Mr Bussutil). Je me doute un peu que c’est lui qui se cache derrière cette barbe au naturel douteux. L’année précédente il était passé à la maison avec cette même tenue à la forte odeur de naphtaline pour nous livrer les jouets à domicile. La complicité que j’avais sentie avec mon père et les accents d’une voie mal dissimulée m’avait mis la puce à l’oreille. Je me suis bien gardé d’avouer que je connaissais le personnage.

    MONDOVI - Noël 1951

     

    Ce soir-là nous avions donc reçu un cadeau des mains de ce père Noël à multiples facettes. Le « grand » patron avait fait un discours. Le photographe avait sorti son gros appareil pour fixer à jamais l’évènement. C'est grâce à lui que nous pouvons vous présenter ces photos.

     

    MONDOVI - Noël 1951

      

    Tous les employés indigènes ou pas sont installés à la même table. Voilà qui prouve que nous vivions plutôt côte à côte qu’ensemble…

    Beaucoup d'indigènes Jeunes ou moins jeunes ont la tête couverte qui d’une chéchia, qui d’un foulard ou un turban. 

    Une petite fille musulmane montre fièrement sa poupée, la même que celle qu'a en mains une fille européenne derrière elle... 

    On ne distingue qu'une seule femme musulmane, non voilée, d’un certain âge. Les mères de familles des jeunes enfants présents sont restées à la maison.

     

     

    MONDOVI - Noël 1951

    Nous sommes attablés parmi les invités.

     

    MONDOVI - Noël 1951

    Non loin, Anne-Marie et sa poupée.

     

    MONDOVI - Noël 1951

    Au fond, certains membres du personnel dont mon père, debout.

         

    MONDOVI - Noël 1951

     

     

     

    Je me garderai bien, de révéler que je sais qui se cache derrière la barbe du Père Noël. Je suis un peu intimidé par la présence de tout ce monde.

    La distribution des jouets n’a pas encore eu lieu.

    Ce n’est pas le moment de risquer la suppression de mon cadeau.

    Je suis là, juste devant père Noël... mon voisin... pour la photo, vêtu de mon short (et oui, le pantalon long était réservé aux grands à cette époque). Je porte le pull que m’a tricoté ma mère et mes plus belles chaussettes blanches.

    Quant à ma sœur, en veste de laine blanche, elle n’en "mène pas large" dans sa minijupe (nous sommes pourtant en décembre). Entre nous se trouve une camarade d’enfance, Anne-Marie qui parait plus à l'aise.

     J’aimais bien ces moments de rencontres. Ils sont malheureusement devenus de plus en plus délicats à organiser, au fil du temps, en raison des craintes d’attentats.

    C’était en 1951. J’avais 7 ans. Je venais tout juste de faire ma rentrée en cours élémentaire 1ère année. Je suis incapable de vous dire ce que m’avait remis le père Noël Bussutil cette année là.

    MONDOVI - Noël 1951 à la Tabacoop. 

    C'est sous ce toit en ruines d'un des docks de la Tabacoop,

    qu'avait été "planté" le magnifique arbre de Noël de l'année 1951.