SANT JORDI à BANYOLES

A BANYOLES, ville catalane à quelques kilomètres de la frontière française, chaque mercredi le marché hebdomadaire de la ville s’installe sur la place Major. C’est l’occasion pour tous les habitants de se retrouver et créer cette ambiance unique qui se rapproche de celle que l’on connaît les jours de fête. Nous sommes justement mercredi, de passage dans la ville et c’est bien de cette ambiance que nous voulons profiter. Un indicateur nous sert de fil conducteur dans la traversée de la ville pour trouver la place major : les personnes chargées de paniers ou de poches qui sont déjà passées par le lieu. Une particularité attire cependant notre attention. Beaucoup sont porteurs de roses rouges. Des hommes, plus précisément. Qu’est ce que cela peut bien signifier ? Le temps de trouver une place de parking et nous voilà en direction de la place major. Aux approches de la place, quelque chose est surprenant. En plusieurs endroits on entend de l’eau couler. Nous marchons sur des dalles qui protègent un petit ruisseau que l’on retrouve un peu plus loin découvert. Nous apprendrons plus tard qu’il s’agit de petits ruisseaux qui s’écoulent depuis le lac naturel implanté un peu plus haut, tout près de la ville. Le lac de Banyoles constitue pour la région de Gérone,  un grand espace ouvert à tous ceux et celles qui souhaitent se relaxer, courir, aller à vélo, faire un tour en barque ou pratiquer des sports aquatiques comme le kayak, l’aviron ou le ski nautique.

En fait, la ville a été  capable de se développer grâce aux canaux d’irrigation que les moines bénédictins du monastère de Sant Esteve de Banyoles construisirent en 812. Les canaux qui coulent sous nos pieds traversent la ville. Ils ont permis de contrôler les inondations et d’améliorer les conditions de vie dans la région. Ils ont été utilisés  pour laver le linge et arroser les cultures dans les champs. Ils ont aidé au développement des industries des textiles, du papier, de la farine.

Les Photos sont de Nicole Morin.

Le lac lui-même a été un lieu de pêche. En bordure, les maisons construites sur l’eau étaient autrefois des abris de pécheurs devenus par la suite résidences secondaires.

La  place major, c'est la place rêvée, vivante, à taille humaine avec des cafés, des petits  restos, des enfants, le véritable lieu de passage et de rencontre. A notre surprise, à défaut de trouver fruits, légumes ou spécialités catalanes nous découvrons des roses, des livres sur des stands tenus la plupart du temps par des associations.. Notre curiosité prend alors le dessus et malgré un catalan calamiteux nous essayons de savoir quel est l’objet de cette animation.

Nous sommes le 23 avril et, ce jour-là , depuis 1456 on fête le Saint patron de la catalogne : Saint Jordi (St Georges). Une rose, symbole de l’amour est offerte aux dames La date coïncide avec la mort de Cervantès et de Shakespeare. La fête du livre a été associée à celle de la rose En 1926, l’écrivain et éditeur espagnol Vicent Clavel i Andrés, originaire mais établi à Barcelone, directeur d’Editorial Cervantes, proposa aux libraires barcelonais d’instituer une fête pour soutenir et diffuser les livres. La date retenue fut d'abord le 7 octobre, avant d'être modifiée au 23 avril, afin de rendre hommage à l'écrivain le plus célèbre du pays, inhumé le 23 avril 1616, Miguel de Cervantes. La Saint Jordi est donc devenue à la fois la fête du livre et celle de la rose, la fête de l’amour et de la culture catalane.

Il est devenu comme coutume que les hommes offrent aux dames une rose et qu’en échange, celles-ci offrent un livre.

Chacun a mis en place une stratégie qui semble avoir mûri longtemps à l’avance. Ici des fleurs fabriquées en pâte à sel, là des roses de verre ou encore des bouquets de vraies roses rouge vif. Dans une vitrine, un jeune homme assis sur une chaise est concentré dans  la lecture d’un ouvrage. A la terrasse d’un café un adolescent comme absorbé par le livre qu’il tient des deux mains sur ses genoux. Sous les arcades de la place , un peu plus loin, tout en chahutant, un groupe de 3 ou 4 filles proposent des roses aux passants. Ce matin, le  pâtissier propose des tartelettes aux couleurs catalanes, ce rouge et ce jaune que l’on retrouve dans les drapeaux qui font office de nappe sur la plupart des étalages. L’enthousiasme, la joie des retrouvailles, l’euphorie que crée l’évènement engendrent un bruit sourd que dominent parfois les échanges verbaux à voix vraiment haute des gens plus proches.

La Catalogne est l’une des 17 communautés autonomes de l’État espagnol. Les communautés autonomes sont totalement compétentes en matière notamment d’urbanisme, d’aménagement du territoire, de tourisme et d’assistance sociale, alors que le pouvoir décisionnaire en ce qui concerne la défense, la politique extérieure, la surveillance des frontières et la monnaie demeure entre les mains du seul État central.

L’institution d’auto-gouvernement est la Generalitat , formée par le Parlement de Catalogne, le président de la Generalitat et le gouvernement catalan. Le Parlement, élu au suffrage universel tous les quatre ans, représente le peuple catalan, élit le président parmi ses membres, élabore, discute et approuve les lois propres à la Catalogne. Le mode de représentation est celui d’une démocratie parlementaire dans laquelle le Parlement donne la responsabilité de former un gouvernement au candidat en mesure de réunir une majorité parlementaire suffisante.